Sommaire
➢ Edito
➢ Programme
➢ Il était une fois…
➢ De jour comme de nuit
➢ Sirhh
➢ La Germination de l’utopie
➢ L’épreuve du vide
➢ Mirage
➢ La vraie vie
➢ Trous de mémoire
➢ 9 m2 pour deux
➢ Anima
➢ Dans la solitude des champs de coton
« En prison la question du regard est centrale, les détenu.es comme les personnels de surveillance sont sans cesse sous le regard de l’autre, dans cette observation réciproque se joue la question du pouvoir. Au dehors, les médias fabriquent le plus souvent une image qui éloigne les détenus.e.s de nous, présentant des corps sans visages, exposés, contrôlés et contrôlables, plaçant le spectateur dans une place d’extériorité. Le spectateur de ces images pense avant tout la détresse du détenu.e, ce qui vient renforcer chez lui un sentiment d’impuissance et de toute puissance, car il peut compatir, tout en étant rassuré de ne pas être à la même place.
Les films que nous avons réalisés, initiés ou produits dans ce travail collectif avec les personnes détenu.e.s proposent un autre point de vue et déconstruisent les figures attendues. Ils se fabriquent dans l’expérience de la relation, dans les changements de place des uns des autres (ceux du dedans et ceux du dehors) tout à la fois acteurs, auteurs, réalisateurs, spectateurs. Au travers de ces différents déplacements, la prison et les personnes détenues qui sont alors représentées, ne sont plus tout à fait les mêmes et ne peuvent plus être regardées de la même façon.
Ces films sont comme des lieux d’utopie, des espaces de jeu qui tentent de suspendre dans l’espace temps de l’expérience et du film, les contraintes carcérales sans bien sur les supprimer, repoussant ainsi les murs, remettant en mouvement les corps et la pensée. Ils viennent interroger le cinéma comme un lieu où s’expérimente la complexité, la richesse du sujet, un lieu de vie et de possibles, où peut s’exercer la subjectivité de la personne détenue, sa capacité de créer et son imaginaire.
Les pratiques et la manière dont se fabriquent ces films sont dans notre approche artistique tout aussi importantes que les œuvres finales. Chaque œuvre porte les traces visibles de son histoire, du processus qui l’a produite. Ces films ne sont pas des produits consommables lisses et délimités, ils contiennent leur propre fragilité. Cette rétrospective révèle un cinéma documentaire travaillé collectivement, comme un chantier ouvert qui se libère des formes et des formats convenus, pour se lier seulement aux mouvements qui l’ont façonné, aux corps qui l’ont désiré. »
Après des études aux Beaux-arts de Marseille, Caroline Caccavale et Joseph Césarini pratiquent la photographie et réalisent des installations vidéo. Dès 1987 ils mettent en place un atelier vidéo dans la prison des Baumettes et entament une réflexion sur la télévision en prison qui se concrétise avec la création de Télé-Vidéo Baumettes, le canal interne de l’établissement. Ils découvrent le cinéma en 1988 avec la rencontre du réalisateur Renaud Victor et partagent le quotidien de la prison, de jour comme de nuit avec des hommes et des femmes détenu.e.s. Cette rencontre sera l’acte fondateur de l’expérience de cinéma au long cours qu’ils engagent en prison. Ils installent en 1997, avec l’association Lieux Fictifs et le soutien de l’administration pénitentiaire, un studio de cinéma permanent où ils développent des actions de formation et de diffusion du cinéma, tout en réalisant et produisant des films avec les personnes détenues.
L’ensemble des films de la rétrospective - hormis l’installation cinématographique multi-écran « Dans la solitude des champs de coton » - est disponible en format DCP pour une projection en salle.
Vous êtes étudiant, chercheur, programmateur et souhaitez pouvoir visionner ces films dans le cadre d’un projet d’étude, de recherche ou d’événement de programmation : merci de nous adresser votre demande en précisant REGARD DEPUIS LA PRISON et votre projet via le formulaire de contact.
De jour comme de nuit de Renaud Victor - 112 mn - 1991
Collaboration à la réalisation Caroline Caccavale et Joseph Césarini
Production : 13 Productions - Bruno Muel
Sortie du livre - DVD « Renaud Victor présence proche » - coll. Cinéma hors capital(e) n°7 - Les Éditions commune
Cinéma Le Gyptis - Dimanche 27 octobre à 19h
Sirrh de Laetitia Martinet - 35mn - 2001
Suivi de : La Germination de l’utopie de Marc Mercier - 30mn - 2001
Coécrits et interprétés par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Productions : Lieux Fictifs
Cinéma Le Gyptis - Jeudi 14 Novembre à 20h
Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès - 120 mn - 2013
Adaptation cinématographique réalisée par Caroline Caccavale et Joseph Césarini –
Continuité dramaturgique du texte et direction d’acteur : Jeanne Poitevin, Maxime Carasso - Chorégraphie : Thierry Thieû Niang - Composition : Jean-Marc Montera
Interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes et des habitants de Marseille
Baumettes historiques - Jeudi 21, vendredi 22 et samedi 23 novembre à 16h30 et 19h
L’épreuve du vide de Caroline Caccavale et Abdoulaye Diop Dany - 60 mn - 2002
Suivi de : Mirage de Tiziana Banchieri - 40 mn - 2000
Coécrits et interprétés par des femmes détenues de la prison des Baumettes
Productions : Lieux Fictifs
Cinéma La Baleine - Vendredi 13 décembre 21h
La vraie vie de Joseph Césarini et Aziz B - 26mn - 2000
Coécrit et interprété par une personne détenue de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs
Suivi de : Trous de mémoire de Jean-Michel Perez - 60 mn - 2007
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs / Ina
Cinéma La Baleine - Vendredi 24 janvier 21h
9m2 pour deux de Joseph Césarini et Jimmy Glasberg - 90 mn - 2004
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Agat Films & Cie / Lieux Fictifs
Cinéma Le Gyptis - Samedi 8 Février 20h
Anima de Caroline Caccavale et Joseph Césarini - 80 mn - 2016
Coécrit et interprété par personnes détenues de la prison des Baumettes et des habitants de Marseille
Artistes associés : Emmanuelle Raynaut, Lucien Bertolina, Thierry Thieû Niang
Production : Lieux Fictifs/ Ina
Cinéma La Baleine - Jeudi 20 février 21h
« Avec Caroline Caccavale de Lieux Fictifs, nous nous sommes rencontrés lors d’une journée d’étude sur la prison au Musée de l’immigration à Paris, en décembre 2017. Depuis nous n’avons cessé de travailler en croisant nos expériences, à la fois différentes et proches, dans et sur l’institution pénitentiaire. Ce faisant, le projet Prison miroir éclaire les correspondances entre nos travaux et nos pensées des deux côtés de l’œilleton. Cette série de textes que j’écris aujourd’hui construit une dialectique entre les films de Lieux Fictifs et mon travail, entre la salle obscure de cinéma et l’espace éclairé de l’exposition.
Le jeu consiste à puiser dans nos langages plastiques respectifs des axes créant des ponts permettant aux spectateurs de glisser d’une certitude à un doute, d’un doute à un déplacement grâce à ces renversements de regards. Il s’agit de problématiser ces connections issues de ma lecture des films à mes créations en créant des items afin d’ouvrir notre imaginaire de la prison à partir de ces enjeux. »
Pour chacun des films de la rétrospective, figure l’oeuvre d’Arnaud Théval qui lui fait écho et un extrait choisi du film. Nous remercions l’artiste pour son autorisation de reproduire ici cette correspondance. Pour plus d’informations : www.arnaudtheval.com
Une immersion pendant deux ans dans le quotidien de la prison de jour comme de nuit avec le réalisateur Renaud Victor. Expérience fondatrice pour les réalisateurs Caroline Caccavale et Joseph Césarini, mais aussi expérience fondatrice au sein de l’établissement qui permet à la caméra de se faire accepter sur ce territoire, dans une présence proche et permanente.
La bataille du soupçon (2019) 48 photographies 75 x 54 cm et 40 x 50 cm
De jour comme de nuit de Renaud Victor - 112 mn - 1991
Collaboration à la réalisation Caroline Caccavale et Joseph Césarini
Production : 13 Productions - Bruno Muel
A partir de l’article « Sortir du cadre » écrit par Marc Mercier, artiste vidéo et directeur artistique du festival « Les Instants Vidéo », un groupe de personnes détenues se questionne sur la notion d’enfermement et de liberté.
Paysage percé et dispositif de mise en ordre (2017) 3 formats 153 x 128 cm, photographie encadrées sous verre et La galerie des glaces (2019) format variable
Sirrh de Laetitia Martinet - 35mn - 2001
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs
La Germination de l’utopie est le récit d’un combat mené contre l’enfermement avec, en bandoulière, les fleurs de la poésie. Comment devenir des passe-murailles ? Comment transformer un univers étroit en un monde ouvert aux possibles ?
Comment quitter la ville rampante (la prison) pour atteindre la ville volante (l’utopie) quand on sait que le chemin qui relie ces deux cités n’a ni commencement ni fin ?
Le mythe de la caverne bleue (2019) 260 x 450 cm, tirage affiche.
La Germination de l’utopie de Marc Mercier - 30mn - 2001
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs
L’incarcération c’est l’épreuve du vide, l’épreuve au sens de supporter et de dépasser une situation de contrainte. Un acte imposé qui dans le dépassement, nous renvoie à la dignité humaine. Ce film est un conte qui fait appel à notre regard d’enfant. Trois femmes détenues à la prison des Baumettes deviennent trois personnages : une danseuse, un clown et une passagère.
Se frayer un chemin entre (2019) 234 x 395 cm, tirage affiche.
L’épreuve du vide de Caroline Caccavale et Abdoulaye Diop Dany - 60 mn - 2002
Coécrit et interprété par des femmes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs
"Entre le désir et le possible, il y a le jeu de la liberté ...
J’ai choisi l’improvisation pour donner un espace au jeu des formes, des corps, des lumières et de l’âme. En complicité avec deux femmes interprètes qui, de l’intérieur, se filment, écrivent leurs dialogues, participent au jeu de la création comme unique forme possible de liberté. »
Un jardin (cour de promenade pour femmes) (2019) 260 x 433 cm, tirage affiche.
Mirage de Tiziana Banchieri - 40 mn - 2000
Coécrit et interprété par des femmes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictif
« La vraie vie » est un film où le regard et l’émotion sont intimement liés à l’acte de mémoire. La mémoire qu’Aziz nous livre transparaît dans le film comme l’énergie qui permet à chacun d’aller de l’avant, de dépasser son histoire, de continuer à chercher.
Chercher quelque chose qui ressemble au bonheur qui fuit toujours...
Pour nous parler de sa vie, de ses désirs, Aziz fait appel à des séquences de cinéma. Son récit nous interroge sur la puissance des images qui brouille parfois notre perception de la réalité vécue.
Avec Malaparte et Kafka (2017) texte encadré 102,5 cm x 102,5 cm, deux photographies encadrées format 103 cm x 153 cm chaque
La vraie vie de Joseph Césarini et Aziz B - 26mn - 2000
Coécrit et interprété par une personne détenue de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs
En amenant l’archive au sein de la détention, nous avons tenté d’emmener les personnes détenues à chercher leurs places face à ces images et ce qu’elles nous racontent. L’histoire, leurs histoires. Au fil du film, les mises en scènes proposées sont plus personnelles, l’image d’archive plus incarnée. Les histoires individuelles nous font rencontrer des hommes sensibles, pudiques en questionnement sur leurs difficultés à gérer l’oubli à partir de la prison.
Incorporations (2019) 103 x 103 cm, photos encadrées (diptyque tatouages)
Trous de mémoire de Jean-Michel Perez - 60 mn - 2007
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Lieux Fictifs / Ina
Ce film a été mis en scène dans un décor de cellule reconstituée en studio à l’intérieur de la prison des Baumettes. Dix hommes détenus y deviennent tour à tour interprètes et filmeurs de leurs propres vies. Chacun d’entre eux s’exprime ainsi à travers des situations quotidiennes en une série de moments forts : amitié, indifférence, confrontation, solitude…
Il n’y a pas d’air autour des corps des détenus photographiés par l’appareil visant à produire la carte d’idendité dans la détention. Ce procédé photographique et le fond blanc ou jaunâtre aplatissent l’épaisseur de l’histoire qu’elles vivent. Nous les voyons comme des images doublé par un numéro d’écrou. Les personnes détenus dans le film 9m2 pour deux de Joseph Césarini et Jimmy Glasberg deviennent comme des sculptures vivantes, des sujets s’exprimant et pensant. La caméra tourne autour d’eux et par eux en créant des situations nous rapprochons intimement de leur réalité. On étouffe, c’est irrespirable puis respirable. La fiction devient l’outil indispensable pour éviter la caricature et le spectaculaire. Le faux décor est de cette justesse nécessaire pour mettre à distance la vulgarité d’une réalité impossible à saisir frontalement. L’apprentissage de la vie à deux et d’une certaine forme d’autonomie se heurtent à toutes leurs dépendances, juste de l’autre côté de l’œilleton. La nuit, l’attente et les peurs sont plus prégnantes, dans la pièce sonore La ronde des oeilletons que j’ai écrite avec le concours de Pauline Boyer, le récit nous conduit sur les pas de ces élèves surveillantes vérifiant le présent-vivant pour chaque cellule. L’air est parfois saturé de l’inquiétude d’y voir la mort ou la crudité des corps. Leur travail nous plonge dans l’intimité de ces hommes qui la leur refuse en bouchant les œilletons ou à l’inverse l’étroitesse de leurs conditions explose à leurs vues, sidérant notre imaginaire. Arnaud Théval
La ronde des œilletons (2019) photo et pièce sonore réalisée avec Pauline Boyer, récit lu par Vincent Théval
9m2 pour deux de Joseph Césarini et Jimmy Glasberg - 90 mn - 2004
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes
Production : Agat Films & Cie / Lieux Fictifs
Des personnes détenues à la prison des Baumettes et des personnes libres - jeunes, adultes et vieux - inventent et fabriquent ensemble des sons, des mouvements, des textes et des images pour mettre en partage un temps commun fait de désirs, de rêves et de réel bousculé. Ils créent un autre mouvement, une fiction, un récit, un nouveau territoire entre le dedans et le dehors.
Incorporations (2017) photographies encadrées 103 x 103 cm
Anima de Caroline Caccavale et Joseph Césarini - 80 mn - 2016
Coécrit et interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes et des habitants de Marseille
Artistes associés : Emmanuelle Raynaut, Lucien Bertolina, Thierry Thieû Niang
Production : Lieux Fictifs/ Ina
Dans la solitude des champs de coton est une installation cinématographique adaptée du texte de Bernard-Marie Koltès. Cette œuvre interroge l’inertie et le mouvement, l’idéal et la réalité, la transgression et la norme. 18 personnes détenues et 9 personnes libres de Marseille s’approprient le dialogue entre Dealer et Client. Ils évoluent dans un même décor, celui d’une friche industrielle, dont une partie est reconstituée à l’intérieur de la prison, donnant dans l’œuvre finale l’illusion d’un même lieu.
* Antimonde d’après Roger Brunet
Le tigre et le papillon (2019) format variable
Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès, Les Editions de Minuit, 1986 adapté par Caroline Caccavale et Joseph Césarini - 120 mn - 2013
Interprété par des personnes détenues de la prison des Baumettes et des habitants de Marseille – Continuité dramaturgique et direction d’acteur : Jeanne Poitevin et Maxime Carasso – Chorégraphie : Thierry Thieû Niang – Composition sonore : Jean-Marc Montera
Production : Lieux Fictifs, Cie Alzhar, Marseille-Provence 2013 et la Friche la Belle de mai