Jeanne Baumberger
Marseille l’Hebdo
« (…) En attendant le verdict du public, Philippe, un des « acteurs-filmeurs » dresse déjà son bilan. Dehors. Puisqu’il a maintenant purgé sa peine. « J’étais détenu depuis deux ans quand j’ai entendu parler de cette formation, raconte-t-il. A départ j’y ai vu une échappatoire. Mais très vite c’est devenu autre chose. Une œuvre commune qui a créé un lien très fort entre nous. J’en suis encore étonné. » Amateur de poésie et de musique classique, Philippe est dans 9m² celui qui surprend sans doute le plus. « William, mon co-détenu du film, et moi, on appartient à des mondes différents, explique-t-il. Dans la vie de tous les jours, ces univers sont étanches, mais dans l’espace réduit de la détention, ils se côtoient et s’apportent de la tolérance. Mon objectif, c’était de le faire découvrir. » Le rapport à l’image a été un autre apport majeur de l’expérience. D’autant plus important que le détenu est par sa situation toujours soumis au regard. « L’entrée en scène » de la caméra a bouleversé ce postulat. « Le Philippe du film me ressemble beaucoup, mais ce n’est pas moi, insiste-t-il. La distance (quand on est filmé) entre soi et l’image qu’on donne, celle qu’on fabrique (quand on filme) entre l’Autre et l’image de l’Autre, c’est vraiment quelque chose que j’ai découvert là. (…) En fait tout ça mène à un vrai travail sur soi-même. » Un sentiment que Caroline Caccavale résume ainsi : « Dans 9m², c’est l’espace du jeu qui a permis l’espace du je. »